Une rencontre fortuite dans les médias sociaux a permis à une patiente dans le besoin de trouver la donneuse d’organe vivante qui a sauvé sa vie.
Lucy Latino a eu l’impression de rencontrer un ange.
L’événement s’est produit dans un couloir d’hôpital. Lucy, vêtue d’une jaquette d’hôpital bleue et d’un couvre-visage, attendait impatiemment sa greffe de rein. Une porte s’est ouverte et son ange se tenait là.
« C’était un sentiment extraordinaire de me trouver en présence de l’héroïne qui était sur le point de me donner une deuxième chance à la vie, affirme Lucy. Je l’appelle mon ange. C’est vraiment comme ça que je l’appelle. »
L’ange de Lucy n’avait pas d’ailes ni d’auréole. Il portait tout simplement le nom de Claire Yuricek.
« Je me souviens d’avoir touché son visage et réalisé qu’elle était vraiment là, raconte Lucy. C’était comme si j’étais témoin d’un miracle sur le point de se produire. J’ai ressenti un lien instantané avec elle, même si je ne la connaissais pas. »
Ce miracle que Claire allait accomplir était de donner un rein pour sauver la vie de Lucy.
Lucy met her kidney donor, Claire, hours before her lifesaving transplant. Watch their story & learn why we’re asking you to change someone’s life by registering to become an organ donor this National Organ & Tissue Donation Awareness Week. Full story: https://t.co/BCw9RJvxmj pic.twitter.com/5KDbNwSPbU
— Canadian Blood Services (@CanadasLifeline) April 25, 2024
À la recherche d’un donneur vivant : d’une enseigne sandwich aux médias sociaux
En 2007, Lucy a reçu un diagnostic de glomérulosclérose segmentaire et focale, une maladie rénale rare qui peut mener à une insuffisance rénale. Malgré son choc initial, elle n’a épargné aucun effort pour gérer sa maladie selon les recommandations des médecins, c’est-à-dire au moyen de médicaments, d’une alimentation nutritive et d’un mode de vie sain. Toutefois, en 2020, la nouvelle qu’elle redoutait le plus est tombée : elle souffrait d’insuffisance rénale.
Le remède le plus efficace contre l’insuffisance rénale est une greffe de rein, mais l’attente pour trouver un donneur décédé compatible se compte en années. Sa seule autre option consistait à trouver un donneur vivant. Or, sans donneur compatible au sein de sa propre famille, l’avenir de Lucy demeurait incertain.
Dès le début de la période d’attente, Lucy a commencé à subir des dialyses régulières. Ce processus élimine les toxines et les déchets que les reins ne sont plus capables de filtrer. Elle devait prévoir quatre heures par traitement, trois fois par semaine.
« Chaque fois, je restais étendue là et j’espérais, déclare Lucy. Plusieurs personnes m’ont permis de garder espoir. »
Une de ces personnes était Charlie, le mari de Lucy. Dans le but de trouver un donneur vivant pour son épouse, il a parcouru tout le centre-ville de Toronto en portant une enseigne sandwich sur laquelle figurait le message suivant : « Need kidney for wife » (traduction : J’ai besoin d’un rein pour ma femme). Dans leurs quartiers respectifs, ses petits-enfants ont affiché des pancartes qu’ils avaient fabriquées eux-mêmes. Puis un jour, Dannielle, la fille de Charlie et Lucy, s’est tournée vers les médias sociaux pour lancer un appel aux donneurs potentiels.
« Ma fille Dannielle a créé la page Lucy Needs a Kidney, explique Lucy. Ça lui a permis de suivre toutes sortes de pistes d’information et de créer de nombreux contacts. »
Dannielle cherchait désespérément un donneur pour sa mère. Elle-même n’était pas compatible. De plus, en raison de son anémie, elle ne pouvait même pas donner de sang à sa mère, qui en avait parfois besoin en raison de son état. Elle a donc décidé de faire du bénévolat au centre de donneurs de sa région et pris l’habitude de remercier publiquement les donneurs de sang dans les médias sociaux. Effectivement, chaque fois qu’une personne annonçait avoir donné du sang, elle publiait un émoji de joie sur ses différents comptes Lucy Needs a Kidney.
Un de ces émojis a changé la vie de Lucy.
Du don de sang au don de rein
À sa première année d’université, Claire était âgée de 18 ans. Profitant de son retour au bercail pour la période des Fêtes, son frère l’a invitée à venir donner du sang avec lui. Même si elle se sentait quelque peu réticente au départ, son frère a réussi à la convaincre et ils ont fait un don ensemble.
Ce fut loin d’être la dernière fois. Elle a commencé à faire des dons de sang sur le campus de son université. Suivant l’obtention de son diplôme, elle a participé à un défi de don de sang au travail.
« Je sentais que je pouvais aider plusieurs personnes, affirme Claire. Un inconvénient vraiment mineur permet de sauver des vies. Une petite heure tous les quelques mois me permet de faire une grosse différence. »
Quelques décennies plus tard, en 2022, Claire comptait 56 dons à son actif. Après son dernier don, elle a fait ce qu’elle avait toujours l’habitude de faire, c’est-à-dire publier un message à cet effet sur Instagram afin d’encourager d’autres personnes à faire un don de sang. Peu après, quelqu’un lui a envoyé un émoji de joie.
Cette personne était Dannielle, à partir du compte Lucy Needs a Kidney.
« Le but de ce compte était clairement énoncé dans son nom, explique Claire. Comme Lucy avait presque le même âge que ma mère, je me suis dit wow… et si c’était ma mère et toute notre famille qui vivaient une pareille situation? Je voudrais que quelqu’un nous aide. »
Sur le compte Lucy Needs a Kidney, Dannielle avait décrit les difficultés qu’éprouvait sa mère en raison de son insuffisance rénale, ainsi que les efforts déployés pour lui trouver un donneur compatible. Elle avait également publié de l’information sur le processus de don de son vivant. Comme la fois où son frère l’avait jadis encouragée à donner du sang, Claire fut convaincue.
« Ça peut paraître ridicule, mais, je ne voyais pas grand différence entre donner du sang et donner un rein, soutient Claire. Cette impression que je pouvais faire quelque chose pour aider quelqu’un était encore plus forte. »
Ainsi, elle a répondu à Dannielle en précisant que son groupe sanguin était O positif et qu’elle remplirait le formulaire pour voir si elle était une donneuse compatible.
« Lorsque j’ai su que Claire allait se faire tester, j’ai ressenti quelque chose d’extraordinaire, affirme Lucy. Je ne sais pas pourquoi, mais, dans mon cœur, je savais que cette personne allait être la bonne. »
Elle avait raison. Claire était compatible. Toutefois, il fallait encore franchir quelques étapes avant de confirmer qu’elle pouvait être la donneuse tant recherchée.
Décompte jusqu’au jour du don
Avant que Claire puisse faire son don, les médecins devaient s’assurer que l’intervention ne poserait aucun risque pour elle et que le rein donné fonctionnerait bien pour Lucy. L’attente était chargée d’émotions.
« J’étais reconnaissante, j’avais espoir, mais j’avais aussi peur, raconte Lucy. Il y avait toujours cette petite voix dans ma tête qui ne cessait de répéter, eh bien, finalement ce n’est peut-être pas la bonne personne. Que vais-je faire si c’est le cas? Mais ce qui m’a beaucoup aidée était de garder espoir, de rester optimiste et de compter sur le soutien de ma famille. »
Heureusement, Claire a été confirmée comme donneuse compatible. Par la suite, elle a gardé contact avec Lucy et sa famille, mais elle ne les a pas rencontrées avant le jour du don.
Ce matin-là, Claire est arrivée très tôt à l’hôpital. Pendant qu’elle attendait d’être préparée pour son intervention, un des employés lui a dit que quelqu’un souhaitait la rencontrer.
« Je croyais que c’était Dannielle, pour me souhaiter bonne chance. Je ne savais pas que Lucy était descendue de sa chambre pour me rencontrer, explique Claire. Elle a dit quelque chose comme plusieurs personnes croient que les anges vivent au ciel, mais mon ange à moi est ici sur Terre. »
La vie après son don de rein
Après la chirurgie, les signes vitaux de Claire étaient bons et elle se sentait très bien. Après deux nuits à l’hôpital, elle a pu rentrer chez elle pour se reposer et se rétablir.
« Je n’ai jamais vraiment ressenti de douleur. J’étais seulement un peu inconfortable de temps à autre, a affirmé Claire. Je dirais qu’après deux semaines, j’étais rétablie à environ 80 pour cent. Après quatre semaines, je pouvais faire tout ce que je faisais avant. »
Quant à Lucy, elle a retrouvé son ancienne vie. Après avoir fait une croix sur plusieurs des choses qu’elle aimait en raison de son état et des défis associés à la dialyse, il y avait tellement d’activités qu’elle voulait reprendre!
« J’ai commencé à m’entraîner au gym. J’ai pu revoir mes petits-enfants. Je fais des promenades. Je m’assois dehors, affirme Lucy. J’ai très hâte de revoir Claire, ses enfants et sa famille. Elle fait maintenant partie de notre famille. »
Depuis cette expérience, Lucy, Dannielle et Claire promeuvent activement le don d’organes.
« Je dirais qu’il s’agit de l’expérience la plus enrichissante de ma vie, mais d’une façon que je n’aurais jamais pu prévoir, soutient Claire. J’ai abordé la situation en me disant que je faisais quelque chose pour aider leur famille, mais je ne comprenais vraiment pas l’ampleur de ce don. Je souhaite à tous de vivre une telle expérience. »
Vous aimeriez vous renseigner sur les dons de personnes vivantes? Nous vous invitons à consulter notre page sur le don d’organes de son vivant, et aussi à évaluer la possibilité de faire don de vos organes et tissus après votre décès.