Sécurité, acceptation, justice et équité (projet SAFE) : risque acceptable et sélection des donneurs

Résumé

Contexte

Le système canadien de don de sang repose sur la participation de donneurs volontaires. Il apparaît qu’un système où tout le monde pourrait a priori donner du sang et dont l’admissibilité finale serait évaluée non pas en fonction de la sexualité, mais en fonction des pratiques sexuelles de chacun (p. ex. par le biais de questions) serait plus équitable. Toutefois, l’acceptabilité d’un tel changement de politique dépend de l’équilibre entre l’équité et le niveau de risque jugés acceptables par la population concernant la sécurité de la chaîne transfusionnelle. L’objectif de ce projet était d’examiner les questions de confiance, d’égalité de traitement et d’acceptabilité du risque chez les principaux groupes de parties intéressées au Canada (p. ex. patients, membres des communautés LGBTQ+ et grand public) et de répondre à la question : « Une modification de la politique de sélection des donneurs amènerait-elle les gens à considérer que le niveau de risque acceptable a été franchi, et les groupes de parties intéressées permettraient-ils de modérer cela? » 

Description

Entre avril 2018 et avril 2019, nous avons mené un sondage anonyme et ciblé en ligne. Les répondants comprenaient divers groupes de patients (96), de groupes LGBTQ+ (103), de groupes professionnels (72) et des gens issus de la population générale (Canada = 312, É.-U. = 258). Nous avons ainsi pu constituer un échantillon de 841 personnes, dont 96 patients, 228 personnes s’identifiant comme membres d’une communauté LGBTQ+ et 72 personnes s’identifiant comme des professionnels. Les données ont été classifiées, puis analysées. Nous avons, entre autres mesures, évalué le niveau de risque perçu acceptable lié aux transfusions sanguines, les croyances morales concernant les préjudices possibles, l’équité, la pureté, l’autorité ainsi que la confiance en l’autre en général, la confiance en le fait que les gens fassent état de leurs pratiques sexuelles en toute honnêteté, la question de savoir si les gens sont capables de se rappeler, de manière fiable, de leurs pratiques sexuelles, et la volonté de devenir et de rester un donneur de sang. 

Résultats

Les résultats de cette étude montrent que le niveau de risque perçu varie en fonction de la politique de sélection des donneurs (politique comprenant une période de non-admissibilité de 12 mois ou de 3 mois, et politique basée sur les pratiques sexuelles des donneurs), mais que le niveau de risque perçu se situe toujours tout juste en dessous ou au-dessus d’un niveau de risque jugé faible et acceptable. C’est-à-dire que, quel que soit le niveau de risque perçu, il est jugé acceptable, et ce, indépendamment de la politique de sélection considérée. De même, le niveau de risque perçu lié à la sécurité des patients varie en fonction de la politique de sélection, mais reste également faible, ce qui signifie que, pour les gens, la sécurité des patients n’est compromise par aucun changement de politique et que cela ne représente aucun risque pour les patients. Il est important de signaler que ce schéma de pensée était le même qu’il s’agisse de patients ou non. Toutefois, les membres des communautés LGBTQ+ ont jugé le risque lié aux politiques de sélection plus faible que les personnes hétérosexuelles, les personnes non-blanches l’ont jugé plus élevé; la faible confiance en l’autre était également associée à un niveau plus élevé de risque perçu pour les 3 politiques. À ce propos, il en ressort que la confiance en l’autre a influé sur l’augmentation du niveau de risque perçu lié aux politiques, et que cela est dû à la faible confiance qu’ont les gens dans la capacité des autres à parler avec honnêteté de leurs pratiques sexuelles. Enfin, les gens pensent qu’en moyenne, la probabilité que les autres se souviennent avec exactitude de leurs pratiques sexuelles est légèrement plus élevée que le hasard (55 %, p = 0,03). 

Applications

Les résultats de cette étude suggèrent que les changements de politique proposés seront acceptés. La confiance que les gens accordent à la capacité des autres à se rappeler avec exactitude de leurs pratiques sexuelles et à en parler en toute honnêteté peut influer sur l’efficacité de tout changement de politique, en particulier les changements apportés à une politique basée sur l’évaluation des pratiques sexuelles. Cette confiance pourrait être améliorée par des interventions visant à rassurer la population et indiquant que la fiabilité des réponses aux questions liées aux pratiques sexuelles a été améliorée (p. ex. retraçage à rebours, utilisation du téléphone cellulaire pour le retraçage des activités survenues dans les 3 derniers mois).

Considérations futures

Bien que ces résultats soient de nature informative et qu’ils soient les premiers du genre à explorer la façon dont l’appartenance à un groupe, les données démographiques, les croyances morales et la confiance en l’autre influencent le niveau de risque perçu, nous admettons que l’échantillon utilisé était spécifique et ciblé, et que la reproduction de cette étude avec un échantillon randomisé de la population canadienne serait souhaitable. À noter, toutefois, que certains résultats obtenus ici ont été reproduits dans le projet FAIR mené au Royaume-Uni. 

Publications

À venir

Le savoir en action

Les résultats de cette étude ont été utilisés dans le rapport du projet FAIR (For the Assessment of Individualized Risk) dont le but était d’étudier la faisabilité de l’ajout de critères d’admissibilité basés sur les pratiques sexuelles à risque à la politique de sélection des donneurs au Royaume-Uni, en juin 2021. Les conclusions du rapport du projet FAIR ont, quant à elles, été citées dans le rapport remis par la Société canadienne du sang à Santé Canada dans le but d’obtenir l’autorisation d’adopter d’autres critères d’admissibilité pour les HARSAH (Alternative criteria for Men who have Sex with Men, Source plasma donation, London and Calgary) et afin de guider la mise en œuvre de ce programme en septembre 2021. Ils seront également utilisés dans le rapport qui sera remis à Santé Canada dans le but d’adopter des critères de sélection basés sur les pratiques sexuelles à risque. 

Acceptability and feasibility of plasma donation


In a continuation and expansion of her MSM Research Program-funded study, Dr. Joanne Otis (University of Montreal) is looking at how source plasma donation in Montreal might be acceptable and feasible from the point of view of cis and trans gay, bisexual and other men who have sex with men, volunteers from Héma-Québec, current donors, and plasma product recipients.

Plasma Program project; ongoing.

Understanding acceptability


Dr. Daniel Grace (University of Toronto) explored the acceptability of existing and alternative eligibility criteria to gay, bisexual and other men who have sex with men.

Project completed and published.

Mathematical models of risk - plasma


Dr. Antoine Lewin (Héma-Québec) led a mathematical modelling study to understand the risk associated with source plasma donation by gay, bisexual and other men who have sex with men.

Project completed and published.