Trois fois greffé des poumons, il était un ardent défenseur du don d'organes
Myles Lynch a également encouragé sa sœur Jillian à poursuivre ses efforts pour aider d'autres personnes en attente d'une greffe.
Myles Lynch a consacré une grande partie de sa vie à parler de l'importance du don d'organes. Il était motivé par sa propre expérience en tant que patient et il comprenait à quel point le besoin de donneurs d'organes et de tissus était grand au Canada.
Myles est né avec la fibrose kystique, une maladie héréditaire qui cause de graves dommages aux poumons, au système digestif et à d'autres organes. De nombreuses personnes atteintes de cette maladie ont besoin d'une transplantation pulmonaire pour survivre. Myles a été le premier patient au Canada à recevoir trois transplantations pulmonaires bilatérales.
Les greffes ont toutes eu lieu en moins de cinq ans, entre l'automne 2014 et le printemps 2019. Pendant toute cette période, Myles a trouvé l'énergie d'aller parler du don d'organes dans des écoles primaires et secondaires et des universités partout en Ontario.
La vie après un diagnostic de fibrose kystique
Myles voit le jour à St Andrews West, en Ontario, le 13 septembre 1997. Son père, Bernie, est ingénieur, et sa mère, Linda, est professeure d'éducation physique. Il est également accueilli dans le monde par sa sœur aînée, Jillian.
Pendant les premières minutes de sa vie, Myles semble être un bébé en bonne santé et son pédiatre affirme que, malgré quelques difficultés, le poupon de 4 kg va suffisamment bien pour rentrer à la maison dès le lendemain.
Dans les semaines qui suivent toutefois, Myles présente des symptômes inquiétants. Il n'a que 28 jours lorsque sa famille parcourt 94 km pour se rendre au Centre hospitalier pour enfants de l'est de l'Ontario afin de trouver des réponses. À l'hôpital, les tests révèlent que Myles souffre d'une double pneumonie et qu'un de ses poumons est partiellement affaissé.
Au cours des trois jours suivants, d'autres tests confirment le diagnostic de fibrose kystique.
« Pendant les premières années de sa vie, Myles a connu de nombreux problèmes de santé et a été hospitalisé pour des infections pulmonaires jusqu'à huit fois par an, se souvient Bernie. Son état ne faisait que s'aggraver. »
Répondre aux besoins médicaux de Myles
Pendant la petite enfance de Myles, s'occuper de lui était un travail à plein temps pour ses parents.
« Il y avait tellement de choses à surveiller, souligne Linda. Enzymes pancréatiques à chaque repas, antibiotiques par inhalation et par voie orale, physiothérapie thoracique quatre fois par jour (martèlement de la poitrine pour éliminer le mucus et l'encourager à tousser), etc. »
« Il y avait bien des aides-soignants qui venaient à la maison, mais c'était compliqué, explique Bernie. Le traitement de Myles était si intense qu'on ne pouvait pas s'attendre à ce que les gens sachent tout ce qu'il y avait à faire. »
« C'était vraiment difficile. Et il n'y avait pas de solution parfaite, car chaque fois qu'on revenait de l'hôpital, on avait toute une série de nouveaux médicaments. »
Jillian, la sœur de Myles, séjournait souvent chez d'autres membres de la famille pour que ses parents puissent s'occuper de son cadet. Sa mère a commencé à la préparer dès l'âge de cinq ans à la perte éventuelle de son petit frère.
« J'ai un vif souvenir des hospitalisations de mon petit frère, raconte Jillian. Myles avait une urgence médicale, soit il ne respirait pas bien soit il avait des problèmes gastro-intestinaux, et ma famille partait soudainement pour l'hôpital. Cela arrivait si souvent que j'avais toujours peur qu'ils doivent encore repartir. »
« Mais je pense que cette expérience m'a aussi fait prendre conscience de l'importance de la famille. Je suis vraiment fière de la façon dont ma famille s'est serré les coudes tout au long de la maladie de Myles et de ses trois transplantations de poumons. Nous avons pris soin les uns des autres. »
L'état de Myles se détériore
Myles n'avait que deux ans de moins que Jillian. Tous deux fréquentaient la même petite école, où leur mère leur enseignait l'éducation physique. Myles allait à l'école aussi régulièrement que possible et partageait l'amour de Linda pour le sport.
« Au basketball, il avait un bon tir, se rappelle Linda. À cause de ses poumons, il ne pouvait pas courir comme les autres, mais ça ne les dérangeait pas. Au baseball, quand c'était à son tour de frapper la balle, un autre joueur courait à sa place. »
À 15 ans, toutefois, Myles passait environ 30 % de son temps à l'hôpital, et à 16 ans, il était sous oxygène en permanence.
Jillian se rappelle clairement le jour de la Saint-Valentin en 2014. Myles était venu la rejoindre à sa chambre avec son support à perfusion et sa bouteille d'oxygène, comme il le faisait souvent même si franchir cette courte distance l'épuisait.
« Il m'a demandé de lui faire des crêpes aux bleuets, puis il s'est effondré », raconte Jillian.
Peu après, Myles a été transporté par avion à l'Hôpital pour enfants malades de Toronto (SickKids), où il a subi sa première évaluation complète en vue d'une transplantation. Sa famille se souvient qu'il se préparait mentalement à la transplantation comme s'il s'agissait d'une épreuve sportive, de ses propres Jeux olympiques.
« Il jouait de la musique comme pour se préparer à une grande performance athlétique. Il écoutait de la musique et il savait ce qu'il avait à faire », raconte Jillian.
Linda se souvient avoir encouragé cet état d'esprit.
« Il était déterminé à rester positif pendant cette période particulièrement éprouvante. »
La première double transplantation pulmonaire
Myles a subi sa première transplantation des poumons à dix-sept ans. Il était positif, préparé et reconnaissant d'avoir la chance de recevoir ces organes.
L'infirmière qui s'occupait de lui a même dit qu'elle n'avait jamais vu un patient aussi heureux avant une transplantation.
« Je pense que ce qui m'étonnait le plus de Myles, c'est que même s'il pouvait à peine respirer, il trouvait suffisamment d'énergie en lui pour nous faire rire », souligne Jillian.
Myles a également créé une vidéo YouTube racontant son expérience. Après la transplantation, « il avait vraiment l'impression qu'on lui avait donné une seconde vie, dit Jillian. Il respirait beaucoup mieux et pour la première fois depuis des années, il pouvait courir. »
En fait, dix mois après cette première transplantation, Myles a été porteur de flambeau pour les Jeux panaméricains, portant la flamme jusqu'à l'hôpital SickKids. À cette occasion, il a rencontré des célébrités et est passé au journal télévisé.
« Je me souviens encore de Myles qui se tourne vers moi et me dit : "Jilly, je crois qu'on est célèbres" », sourit Jillian.
La deuxième transplantation pulmonaire bilatérale
Hélas, deux ans après cette première transplantation, le corps du jeune homme de dix-neuf ans commence à rejeter les nouveaux poumons. Myles a besoin d'une autre transplantation.
Généralement, une greffe de poumons peut ajouter sept ans à la vie d'un receveur, bien qu'un petit nombre de patients puisse survivre plus de vingt ans.
« À cette époque, se souvient Jillian, Myles m'a demandé : "Penses-tu que les gens vont avoir l'impression que j'ai échoué parce que je n'ai pas été capable de faire tenir ces poumons, ce cadeau unique, aussi longtemps que prévu?" »
Tandis que Myles s'inquiétait d'échouer, sa sœur était tout simplement en admiration devant l'incroyable combativité de son frère.
« Juste avant sa deuxième transplantation, je lui ai demandé comment il faisait pour supporter une situation aussi difficile. Il m'a répondu : "Jilly, il y a longtemps, j'ai commencé à voir chaque jour comme un cadeau." »
« Myles était vraiment reconnaissant pour chaque jour supplémentaire, ainsi que pour les incroyables médecins qui l'ont soigné, pour l'innovation médicale et pour le soutien de ses parents, de sa sœur et de ses amis », souligne Jillian. Le jeune homme était également déterminé à tirer le meilleur parti du temps qui lui était donné. Après sa deuxième transplantation, en plus de prononcer des discours sur son expérience de greffé un peu partout en Ontario, il a fait un voyage épique en voiture à Boston avec son cousin Ben.
Une troisième transplantation des poumons
À peine deux ans plus tard, Myles doit subir une troisième transplantation des poumons. Aucun autre patient n'a subi trois greffes du genre au Canada.
Cette troisième opération se déroule sur plusieurs jours parce que Myles souffre de graves complications : rupture d'une artère pulmonaire, caillots sanguins et perte de sang extrême. Mais il survit, et comme auparavant, il est déterminé à profiter au maximum de ces nouveaux jours reçus en cadeau. À peine quatre mois après l'opération, il se rend à Golden, en Colombie-Britannique, pour le mariage de sa cousine Haley.
Il parcourt également le pays pour sensibiliser les gens au don d'organes et de tissus et à la nécessité de s'inscrire à un registre.
Pour immortaliser cette aventure estivale, Myles produit un film intitulé 8 Thousand Myles. Dans le film, il explique ce que c'est que de grandir avec la fibrose kystique et de subir plusieurs transplantations.
Il milite également en faveur d'un système national de consentement présumé avec « option de refus », selon lequel toute personne au Canada serait présumée avoir donné son consentement au don d'organes après son décès, à moins d'avoir exprimé officiellement son refus. Myles estime qu'un tel changement pourrait sauver des milliers de vies chaque année.
« J'ai eu la chance de pouvoir obtenir trois paires de poumons au cours des cinq dernières années, mais c'est exceptionnel. Il y a beaucoup de patients pour qui le temps s'écoule dans l'attente d'un donneur compatible, explique Myles dans son film. Il me semble important d'essayer de faire tout ce que je peux pour aider le plus grand nombre de personnes possible. »
Myles était également déterminé à améliorer l'expérience des patients qui subissent une transplantation. Il parlait ouvertement avec ses médecins et les encourageait à demander à d'autres patients à quoi ils s'intéressaient et ce qu'ils souhaitaient laisser en héritage. D'ailleurs, sa famille a déjà entendu certains médecins dire que Myles avait changé la façon dont ils traitaient leurs patients.
Choisir ce qu'on laisse derrière soi
Durant la dernière année de sa vie, Myles savait qu'il allait mourir, mais il continuait à penser aux autres et à ce qu'il pouvait faire de plus avant de partir. Il voulait qu'on se souvienne de lui non pas pour les greffes qu'il avait reçues, mais pour son travail en tant que défenseur du don d'organes. C'est donc dans cette optique qu'il a décidé de faire don de son propre corps à l'Université de Toronto à des fins de recherche.
Il a également continué de créer des souvenirs avec sa famille. Jillian se souvient particulièrement d'une occasion où Myles l'avait conduite à un cours à Toronto.
« Il y avait une chanson à la radio et on l'a modifiée à notre goût. Dans notre version, on avait ajouté : "Je veux vivre toute ma vie, je veux faire la fête aussi longtemps que Betty White" », se souvient-elle.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est exactement ce qui est arrivé. Après avoir été hospitalisé en novembre 2021, et de nouveau brièvement, en décembre, Myles a passé un dernier Noël à la maison avec les membres de sa famille. C'est entouré d'eux qu'il est décédé au petit matin le 31 décembre 2021, le même jour que l'actrice bien-aimée.
Une belle connexion
Avant son décès, Myles a également joué un rôle dans la vie sentimentale de sa sœur.
Juste avant la troisième transplantation de Myles, Jillian visitait l'Hôpital général de Toronto lorsqu'elle s'est retrouvée dans un ascenseur avec Bruce, son partenaire actuel, qui était urologue à cet hôpital.
« Je me souviens avoir eu l'impression qu'il était quelqu'un de très bien », avoue-t-elle.
Bruce et Myles se sont tout de suite bien entendus. En fait, ils se sont rencontrés le jour du premier rendez-vous du couple, lorsque Jillian est allée déposer un des plats favoris de Myles à l'hôpital en compagnie de Bruce. Plus tard, alors que Myles se remettait encore de sa transplantation, ils ont tous les trois fait un tour d'hélicoptère au-dessus de la ville de Toronto.
Les trois ont également eu de sérieuses discussions.
« Chaque fois que Myles rencontrait Bruce, il lui posait un tas de questions sur son état. Il cherchait aussi à savoir s'il était un bon parti pour sa sœur, dévoile Jillian. Bruce a un grand sens de l'humour et c'est une personne formidable; il a même pris le temps et le soin de rendre visite à Myles de son propre chef.
« C'était très important pour moi, ajoute-t-elle. Les deux avaient une connexion spéciale. »
« Bruce était un soutien incroyable pour toute la famille. Le jour du décès de Myles, il a fait en sorte que je rentre à la maison en toute sécurité. »
L'héritage d'une famille
Jillian est aujourd'hui âgée de 26 ans et vit à Toronto avec Bruce. Elle est déterminée à poursuivre l'œuvre de son frère. Sur son compte TikTok, elle partage ses pensées et ses expériences. Elle travaille aussi à la préparation d'un livre intitulé Bonus Days (chaque jour est un cadeau) qui raconte son histoire avec son frère.
De plus, en tant qu'instructrice en secourisme et en réanimation cardio-pulmonaire et alliée des organismes sans but lucratif, Jillian s'est souvent employée à sensibiliser le public à l'importance du don d'organes et de tissus. Elle espère également trouver des occasions, dans sa vie professionnelle, de renseigner les gens sur le sujet.
« Dans le cadre de mes activités professionnelles dans la région de Toronto, j'ai organisé des déjeuners-conférences sur divers sujets pour 170 entreprises, explique Jillian. J'adore ce travail et je trouve que c'est une excellente occasion de sensibiliser les gens. »
Jillian souhaite également travailler avec des acteurs importants de la communauté du don d'organes et de tissus, notamment Lucie Dumont, fondatrice de Chaîne de vie. Cette organisation caritative contribue à sensibiliser les jeunes de quinze à dix-sept ans au don d'organes et de tissus dans le cadre d'un programme scolaire. Lucie connaissait le travail de Myles et avait espéré entrer en contact avec lui avant sa mort.
De nouveaux sommets pour l'éducation au don d'organes et de tissus
Le jour du décès de Myles, Jillian a publié sur TikTok une vidéo qui a été visionnée plus de trois millions de fois. Grâce à cette vidéo qui a été vue par une collègue de Lucie, les deux femmes devraient se rencontrer en mai à l'occasion d'une conférence pour les gens touchés par la transplantation d'organes.
« Mon frère avait une grande passion pour la sensibilisation au don d'organes, et une partie de moi veut trouver la meilleure façon de poursuivre son héritage, déclare Jillian. Je suis en train de construire ma vision et je veux essayer de faire quelque chose de positif. »
Un donneur d'organes peut sauver jusqu'à huit vies, et un don de tissus a le potentiel d'améliorer la vie de 75 personnes. Au Canada, plus de 4 000 personnes attendent la greffe qui leur sauvera la vie. Officialisez votre intention de donner vos organes et vos tissus en vous inscrivant au registre de don d'organes de votre province ou territoire, et discutez-en avec votre famille, c'est important. Vous cherchez des ressources pour sensibiliser les autres? Consultez notre Portail pédagogique sur le don d'organes et de tissus pour la vie.