Le sang rare de ce donneur parcourt 6 000 km pour sauver une vie

11 octobre 2024
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Rare blood donor sitting in chair as phlebotomist draws his blood.

Il apprend que son groupe sanguin est extrêmement rare après que l’un de ses premiers dons soit soumis à des tests spéciaux

Jason Daum aime donner. C’est dans sa nature, dit-il. C’est sa façon de comprendre le monde. 

« Je pense que c’est une partie importante de la façon dont nous permettons aux autres de s’améliorer et dont nous nous améliorons nous-mêmes, déclare Jason, propriétaire-exploitant d’une entreprise de rénovation à Regina, en Saskatchewan. Je crois vraiment que cela fait partie de mon identité. » 

Mais il ne s’attendait certainement pas à donner comme il l’a fait au printemps dernier, en donnant du sang pour un patient de l’autre côté de l’océan. Il s’avère que son groupe sanguin est si inhabituel que seule une poignée de donneurs de sang dans le monde sont connus pour l’avoir. Et il se trouve qu’une autre personne de ce groupe, un patient, a eu besoin d’une transfusion en juin dernier. 

Devenir un donneur de sang rare 

Jason a donné du sang pour la première fois il y a 18 ans, à l’âge de 17 ans. Il donnait régulièrement avant d’en perdre l’habitude. Lorsqu’il a recommencé il y a 10 mois, après que sa fille eut fait un don et lui eut donné un petit encouragement, la procédure a été quelque peu différente. Il a eu la possibilité de préciser son appartenance ethnique dans un questionnaire. 

Jason a choisi « Noir ». Choisir de répondre à cette question a directement conduit à la découverte de son groupe sanguin rare, ce qui l’a mis sur la voie d’un don exceptionnel quelques mois plus tard. 

Pour comprendre pourquoi, il faut connaître un peu les groupes sanguins. Chaque globule rouge de l’organisme est recouvert de molécules appelées « antigènes ». Un petit nombre d’entre eux déterminent les principaux groupes sanguins (A, B, AB et O, qui peuvent tous être positifs ou négatifs pour le facteur Rh), mais il existe aussi des centaines d’autres antigènes. Si vous avez des antigènes inhabituels ou s’il vous manque des antigènes que la plupart des gens ont, votre groupe sanguin peut être « rare », c’est-à-dire se présenter chez moins d’une personne sur 500, même si vous avez une combinaison ABO et Rh très courante, telle que O-positif. 

En outre, comme les antigènes sont héréditaires, les profils qui sont courants dans un groupe ethnique peuvent l’être moins dans un autre. Et si tout le monde peut avoir un groupe sanguin rare, certains groupes rares ne se rencontrent que chez des personnes ayant des origines ancestrales particulières. 

C’est pourquoi, en 2022, la Société canadienne du sang a commencé à demander aux donneurs des précisions sur leur appartenance ethnique. Si vous répondez à cette question, nous procéderons à une analyse de l’ADN de votre don de sang, afin de comprendre vos antigènes au niveau génétique (tout en respectant votre vie privée en n’analysant pas d’autres informations génétiques). Ce processus, appelé « génotypage », donne déjà des résultats incroyables. Par exemple, grâce au génotypage des donneurs d’origine philippine, nous avons triplé le nombre de donneurs d’un groupe sanguin rare, appelé « JK3 », habitant au Canada. 

Il est essentiel de trouver des donneurs de sang rares, car si le génotypage des donneurs n’est pas indispensable pour la plupart des patients qui ont besoin de transfusions, certains qui présentent des antigènes ou des combinaisons d’antigènes inhabituels développent des anticorps. Ces patients peuvent souffrir d’une réaction immunitaire dangereuse s’ils reçoivent du sang qui ne leur est pas adapté. Ils bénéficient grandement des efforts visant à augmenter le génotypage et à constituer un bassin de donneurs plus diversifié. 

Découvrez pourquoi nous avons besoin d’un bassin de donneurs diversifié 

Woman in a lab coat looking at vials in a laboratory.
La Société canadienne du sang soumet certains dons de sang à des tests de dépistage d’antigènes et de combinaisons d’antigènes inhabituels. 

« J’ai la responsabilité de continuer à donner du sang. »

Le groupe sanguin incroyablement rare de Jason a été découvert lorsqu’il a été sélectionné pour un génotypage. 

« Il était négatif pour deux antigènes Dombrock. L’un est Joa et l’autre Hy ou Holley », explique le Dr Matthew Yan, responsable du Programme de sang rare à la Société canadienne du sang. Il est rare d’être négatif pour l’un d’entre eux, et il est encore plus rare d’être négatif pour les deux, mais cela arrive au sein de la population noire. » 

Conscient que seule une poignée de personnes dans le monde partagent son groupe sanguin, Jason a un sens du devoir. 

« Pour moi, cela signifie que j’ai la responsabilité de donner régulièrement du sang, explique Jason. Quand on me le rappelle, il faut juste que je prenne le temps de le faire; parce que c’est ça en fait : il faut simplement prendre le temps. » 

Le besoin de sang rare dépasse les frontières 

Si la quasi-totalité du sang donné au Canada est utilisée pour les patients du pays, le sang rare est également une ressource internationale précieuse. 

« Chaque fois que nous trouvons un donneur rare au Canada, nous sommes très enthousiastes, car cela aide non seulement les patients du Canada, mais aussi n’importe qui dans le monde », ajoute le Dr Yan. Les patients du Canada bénéficient également de la compatibilité avec des donneurs à l’étranger. 

L’International Rare Donor Panel, qui regroupe des pays du monde entier, facilite la recherche de donneurs de sang rare et de donneurs compatibles pour des jumelages transfrontaliers. 

C’est l’une de ces recherches qui a permis, au printemps dernier, d’identifier Jason comme étant compatible avec un patient irlandais. À l’époque, cependant, l’enthousiasme renouvelé de Jason pour le don de sang a posé un problème. En effet, pour protéger leur santé, les hommes doivent normalement attendre au moins 56 jours entre chaque don. Lorsque l’appel est arrivé, Jason était encore en période de récupération. 

Heureusement, la Société canadienne du sang a pu évaluer l’état de santé de Jason afin de s’assurer qu’il puisse faire ce don exceptionnel en toute sécurité. 

« Nous avons examiné son taux d’hémoglobine, ses tendances, et il a toujours été assez robuste, précise le Dr Yan. Je me suis donc dit qu’il pouvait venir plus tôt que prévu et que son taux d’hémoglobine ne poserait pas de problème. » 

Regina Donor Centre staff pose for a picture with Jason Daum after his donation.
Le personnel du centre de donneurs de Regina est resté tard pour s’assurer que ce don spécial puisse avoir lieu.

Un effort supplémentaire pour les patients ayant besoin de sang rare 

Un test a confirmé que le taux d’hémoglobine de Jason était en fait suffisamment élevé pour que le don puisse avoir lieu. Il a donc été invité à faire un don pour le patient d’outre-mer, mais un scénario inattendu se profilait à l’horizon. 

Le jour du rendez-vous, Jason n’est pas arrivé à l’heure et, à l’approche de la fermeture du centre de donneurs, le personnel a commencé à s’inquiéter. Heureusement, ils l’ont joint et ont découvert qu’il avait commis une erreur qui pourrait facilement arriver à n’importe qui : il avait inscrit le rendez-vous dans son calendrier en se trompant de fuseau horaire. 

Dès qu’il a découvert l’erreur, Jason a tout laissé tomber et s’est précipité au centre de donneur, désormais fermé, où le personnel était resté tard avec un superviseur qui n’était pas en service et qui était également venu pour l’occasion. 

« Ils attendaient tous là, et je me suis senti spécial parce qu’il y avait des gens qui ne travaillaient pas et qui étaient venus juste pour assister à l’événement », raconte Jason. 

Jason et les employés du centre de donneurs n’ont pas été les seuls à se surpasser. Du sang supplémentaire a été prélevé pour être envoyé en Irlande afin d'y subir les tests requis par l'UE. Dès que le don a été collecté, il a été acheminé vers un autre établissement de la Société canadienne du sang pour y être traité, puis vers un entrepôt où il a été conditionné dans un conteneur à température contrôlée et expédié vers l'Irlande. 

Pour des raisons de confidentialité, il est peu probable que Jason découvre un jour qui a reçu son sang et pourquoi cette personne en a eu besoin. Mais cela n’enlève rien à cette formidable expérience. 

« En ce qui me concerne, cet aspect n’a aucune importance. Ce qui compte, c’est que je sois là pour aider quelqu’un et que j’aie la possibilité de le faire, confie Jason. Je suis heureux d’avoir pu participer à ce projet et j’espère pouvoir continuer à le faire. » 

« Je pense que j’en suis à 52 dons à l’heure actuelle, et j’espère pouvoir continuer à donner pendant encore de nombreuses années. » 

Chaque jour, des gens ont besoin de sang de donneurs compatibles. La Société canadienne du sang encourage les personnes de toutes origines à donner du sang afin de répondre aux besoins des patients. Votre don pourrait contribuer à sauver une vie. Pour prendre un rendez-vous, téléchargez l’application DonDeSang, allez à sang.ca/donner ou composez le 1 866 JE DONNE (1-866-533-6663). 

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