Comment se comportent les bactéries lors de la fabrication des plaquettes?
En bref ...
Cette étude montre la façon dont la croissance des bactéries est affectée par la méthode de production de la couche leucocytaire.
Les plaquettes de la Société canadienne du sang peuvent être produites de deux façons. La première consiste à extraire les plaquettes du sang directement du donneur à l’aide d’une machine d’aphérèse. La deuxième, à savoir la « méthode de la couche leucocytaire », consiste à recueillir le sang total de quatre donneurs et à isoler les plaquettes qui y sont contenues pour les recombiner en une seule unité destinée à la transfusion. Nos chercheurs ont cherché à connaître les mécanismes de survie et de croissance de différentes souches de bactéries lorsque la méthode de la couche leucocytaire est utilisée. Comprendre les mécanismes de survie et de croissance des bactéries pendant ce processus permettrait d’identifier les étapes à optimiser pour réduire les risques de contamination des plaquettes et, par conséquent, améliorer l’innocuité des produits plaquettaires.
Comment les chercheurs ont-ils procédé?
Pour reproduire la contamination bactérienne des plaquettes, les chercheurs ont ajouté des bactéries à des unités de sang total données à la recherche et ont mesuré la quantité de bactéries tout au long du processus de préparation de la couche leucocytaire. Ils ont utilisé des bactéries provenant de huit souches différentes : deux souches commerciales, deux souches détectées avec des analyses de routine, deux souches trouvées dans des unités de plaquettes expirées et deux souches impliquées dans des réactions transfusionnelles mortelles. Ils ont relevé la quantité de bactéries présentes après l’étape de repos requise par cette méthode. Ils ont également étudié la façon dont les bactéries se répartissent dans la couche leucocytaire, les globules rouges et le plasma après centrifugation du sang total. Enfin, ils ont examiné les marqueurs de qualité des plaquettes – soit le marqueur d’activation plaquettaire CD62P et la réponse plaquettaire à la diffusion dynamique de la lumière aux premier et cinquième jours d’entreposage – afin de déterminer s’ils permettaient d’indiquer, de façon fiable, la présence des bactéries.
Quelles sont les conclusions de l’étude?
- Pendant l’étape de repos, la croissance des bactéries a varié selon le type de bactérie. Les bactéries provenant des deux souches commerciales ont été éliminées et les bactéries provenant des unités de plaquettes expirées ont survécu sans pour autant se multiplier. En revanche, les bactéries issues des souches détectées par les analyses de routine et de celles impliquées dans des réactions transfusionnelles mortelles étaient présentes à de fortes concentrations.
- Les bactéries se sont réparties différemment après la centrifugation : les globules rouges et la couche leucocytaire en contenaient davantage que le plasma. Ce qui explique pourquoi les unités finales de plaquettes contiennent moins de bactéries, puisqu’on dilue les bactéries lorsque l’on mélange la couche leucocytaire et le plasma pour obtenir une unité de plaquettes.
- L’étape de réduction leucocytaire a permis de réduire la quantité de bactéries.
- Les marqueurs de qualité n’ont pas permis de déceler, de manière constante, la contamination bactérienne.
Comment utiliser les résultats de cette étude?
L’étude a montré que les souches de bactéries se multiplient différemment dans le sang total pendant la période de repos de la méthode de la couche leucocytaire, ce qui peut influer sur l’efficacité des analyses de routine effectuées sur les unités de plaquettes. En effet, on vérifie la présence de bactéries dans les unités de plaquettes en prélevant un échantillon que l’on transfère dans un flacon de culture liquide, qui est ensuite incubé. Les unités contaminées par le type de bactéries qui prolifèrent pendant la période de repos contiendraient suffisamment de bactéries pour que celles-ci soient détectées (toutefois, des quantités élevées de bactéries pourraient poser problème avec les outils d’inactivation des agents pathogènes). Concernant les types de bactéries qui ne se multiplient pas, leur concentration étant nettement réduite dans l’unité finale en raison de la dilution et de la réduction leucocytaire, il est possible que l’on ne puisse pas les détecter (faux négatif).
Les marqueurs de qualité des plaquettes étudiés n’ont pas permis de prévoir la contamination. Ils ne doivent donc pas être utilisés comme moyens de détection bactérienne.
La diminution de la quantité de bactéries due à la centrifugation et à la filtration peut expliquer pourquoi les unités de plaquettes produites avec la méthode de la couche leucocytaire apparaissent moins fréquemment contaminées que les unités recueillies par aphérèse. On pourrait donc se baser sur cette étude pour apporter des modifications aux processus de production et d’analyse des plaquettes dans le but d’améliorer l’innocuité de ces produits. On pourrait, par exemple, envisager de réaliser ces analyses de routine sur le sang total.
À propos de l’équipe de recherche
L’étude a été réalisée par le laboratoire de Sandra Ramirez-Arcos, chercheure en développement au sein du groupe chargé du développement de produits et de procédés du Centre d’innovation de la Société canadienne du sang. Mariam Taha est une ancienne étudiante en doctorat du laboratoire de Mme Ramirez-Arcos. Qi-Long Yi est biostatisticien principal à la Société canadienne du sang. Craig Jenkins est gestionnaire principal au sein du groupe chargé du développement de produits et de procédés du Centre d’innovation de la Société canadienne du sang. Peter Schubert est chercheur associé au Centre d’innovation et professeur adjoint d’enseignement clinique au département de pathologie et de médecine de laboratoire de l’Université de la Colombie-Britannique. L’étude a été réalisée en collaboration avec Miloslav Kalab, chercheur honoraire à Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Le contenu du présent concentré de recherche est tiré de la publication suivante
[1] Taha M, Kalab M, Yi QL, Maurer E, Jenkins C, Schubert P, Ramirez-Arcos S. Bacterial Survival and Distribution During Buffy Coat Platelet Production. Vox Sang 2016. 111(4):333-340.
Remerciements : Cette étude a bénéficié du soutien financier de la Société canadienne du sang (programme de développement de produits et de processus et bourse d’études postdoctorales accordée à Mariam Taha), elle-même financée par les ministères de la Santé fédéral (Santé Canada), provinciaux et territoriaux. Les opinions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement celles des gouvernements fédéral, provinciaux ou territoriaux du Canada. Cette étude a bénéficié du soutien financier de LightIntegra Technology Inc. La Société canadienne du sang remercie les donneurs de sang qui ont permis de mener cette étude. Le présent Concentré de recherche a été préparé par Mariam Taha.
Mots-clés : contamination bactérienne, plaquettes, couche leucocytaire, production de plaquettes
Vous voulez en savoir plus? Communiquez par courriel avec Sandra Ramirez-Arcos à sandra.ramirez@blood.ca.
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